Retour sur le "Hameautonome", un des cinq prototypes des "Mercredis de l'hydrogène"

Publié par Rudy Amand, le 22 juillet 2019   930

Cette contribution est le fruit d'un travail collectif réalisé par les membres du groupe. Ont participé aux recherches d'informations et à la rédaction : Dominique, Emmanuel, Gilbert, Jacques, Léa, Rudy... L'investissement de Pauline Ducoulombier (Le Dôme) dans la bonne marche des ateliers a été essentiel.

Le dernier « mercredi de l’hydrogène » a donné lieu à une présentation de l’ensemble des prototypes élaborés au fur et à mesure des séances. Parmi eux, le projet « Hameautonome » se distingue dans la mesure où il n’est pas parvenu à produire un prototype mobilisant les outils disponibles au Dôme. Pour autant, doit-il être considéré comme un échec ? Tentative de réponse.

Lors du premier atelier, l’objectif affiché par les membres du groupe était de « prototyper une maquette de village autonome en énergie ». Si le projet apparaît en phase avec les attentes des organisateurs, les participants ont collectivement décidé d’accroître les contraintes. En effet, le « Hameautonome » a pris pour référence le projet d’Emmanuel Cardet, agriculteur bio dans la Manche, qui cherche à réinscrire son projet d’autonomie énergétique dans une démarche écologique beaucoup plus large associant un maraîcher, un boulanger, un constructeur de maisons terre/paille formant un pôle d’activités auquel de nouveaux habitants pourraient s’associer. À partir de l’exemple de « La Maturie », Dominique Pupin, lui-même agriculteur, espérait accroître son expérience afin de poursuivre la démarche entamée sur son exploitation en matière d’utilisation des énergies renouvelables et qui, pour le moment, repose sur l’utilisation d’une chaudière à bois déchiqueté alimentant en chaleur deux maisons et fournissant l’eau chaude pour l’une d’entre elles.

Des difficultés à schématiser la complexité de la réalité

Le problème de la réalité, c’est qu’elle est complexe et nécessite des connaissances et des compétences dont tous les participants ne disposent pas. Même si la démarche « LivingLab » consiste aussi à permettre l’échange d’informations entre des publics aux profils dissemblables, il s’est avéré qu’un temps peut-être trop conséquent y avait été consacré surtout au moment d’appréhender les différents procédés de production énergétique – le photovoltaïque, la méthanisation, le bois (chaudière) – et d’évoquer leur adaptation aux besoins réels de l’exploitation d’Emmanuel Cardet. Chaque solution était discutée, confrontée aux caractéristiques des bâtiments, à l’exposition des toits ou aux futurs aménagements envisagés à la « Maturie ». Ces délibérations – si elles correspondent bien à l’idée de fabrique d’un public « éclairé » associée à la recherche participative – ont peut-être fini par constituer un frein à l’efficacité du groupe au moment de passer à la réalisation de la maquette, annoncée pourtant comme objectif lors de la première séance.

Les mercredis de l’hydrogène : là où on apprend des choses ensemble.

Mais est-ce si important ? Le « Hameautome » ne doit pas être considéré comme un échec pour plusieurs raisons. La première est liée aux rencontres auxquelles il a données lieu : entre les membres du groupe, d'abord, puisque Dominique Pupin et Gilbert Lesage sont allés rendre visite à Emmanuel Cardet à « La Maturie » dans le but de mieux saisir les problématiques rencontrées par ce dernier et confronter leur expérience respective au « terrain » ; mais aussi, ensuite, avec des acteurs de la transition énergétique à l’image de ce représentant de Biomasse Normandie qui a proposé de reprendre contact avec les deux agriculteurs du groupe afin de leur apporter son expertise dans la conception de leurs futurs projets. L’autre réussite associée aux « Mercredis de l’hydrogène », c’est la prise de conscience à laquelle ils ont donné lieu, celle de la complexité des différentes formes de production d’énergie et de leurs coûts. A ce titre, la question de la méthanisation a marqué les participants. En effet, il est apparu, au fur et à mesure des interventions des experts mobilisés par le Dôme, qu’il était nécessaire de compter au moins 120 vaches et de favoriser leur concentration dans des bâtiments plutôt que dans les pâturages pour pouvoir réaliser une unité de méthanisation à la ferme telles qu’elles sont parfois promues par l’ADEME. Ce mode de production, en phase avec la transition énergétique, apparaît néanmoins contraire au modèle d’une agriculture respectueuse de l’environnement.

Et après ?

Les visites de terrain et les données collectées ont conduit les participants à se focaliser sur l’idée d’exploiter les déchets alimentaires dans le but de produire du méthane. Il s’agirait, selon les informations partagées par Gilbert Lesage, d’une unité de production domestique sur le modèle de celles qui sont développées par une association à Madagascar ou proposées par une entreprise israélienne. Ces procédés présentent l’avantage de correspondre davantage à la taille des exploitations des deux agriculteurs du groupe tout en permettant d’envisager une transition énergétique et écologique. Certains membres du groupe semblent prêts à s’investir dans la construction d’une de ces unités. Cette envie trouvera-t-elle un prolongement dans les faits ? Le Dôme s’associera-t-il à la démarche ? L’ADEME pourrait-elle s’impliquer ? Ces nouvelles questions témoignent de la démarche même du LivingLab : permettre à un public informé de formuler de nouveaux questionnements et de s’approprier les moyens de les résoudre.