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"Je ne voulais pas regretter de ne pas avoir tenté l'expérience..."

Publié par Guillaume Dupuy, le 5 juin 2025   120

Alexiane Phan, doctorante en génie civil à Builders Lab, est la lauréate du Prix du jury de l’édition régionale 2025 de “Ma thèse en 180 secondes”. Elle aura l’opportunité de représenter la Normandie lors de la finale nationale le 17 juin prochain à la Grande halle de la Villette (Paris).

“Je ne me voyais pas sur la première marche, j’étais déjà prête à applaudir la lauréate ou le lauréat !”. La surprise a été grande pour Alexiane Phan, 26 ans, lorsqu’elle a reçu le Prix du jury “Ma thèse en 180 secondes” le 13 mars 2025 à l’Institut national des sciences appliquées (INSA Rouen Normandie). Une fierté et un défi pour la jeune chercheuse en génie civil qui se rendra dans quelques jours à Paris pour participer à la finale nationale du concours.

Bonjour Alexiane ! Tu es donc la grande gagnante régionale de “Ma thèse en 180 secondes” : c’est toi qui aura l’opportunité de représenter la Normandie lors de la finale nationale en juin prochain. Pas trop de pression ?

Je n’ai pas eu beaucoup de temps pour y réfléchir depuis la finale régionale mais, pour être honnête, j’ai eu un coup de pression il y a quelques jours en y pensant. C’est tout de même ironique que ce soit une Lyonnaise qui ait la charge de représenter la Normandie. Je ne veux décevoir personne, surtout pas les autres finalistes qui méritaient tous et toutes cette victoire !

Tu n’es donc pas originaire de Normandie ?

Non, je suis née et j’ai commencé mes études supérieures à Lyon. J’ai ensuite été à Laxou, à côté de Nancy, où j’ai suivi une Prépa “ATS Génie civil” [Classe préparatoire scientifique d'un an, qui permet aux titulaires d'un Bac +2 ou +3 d'intégrer une école d'ingénieur·e·s via des concours spécifiques, ndlr] puis j’ai intégré l’École normale supérieure Paris-Saclay (ENS Paris-Saclay), en Île-de-France. Je suis arrivé à Caen il y a seulement un an et demi pour mener la première partie de ma thèse à Builders · École d’ingénieur·e·s et je suis aujourd’hui de retour à l’École de l’aménagement durable des territoires (ENTPE), dans la banlieue lyonnaise pour finir mes recherches.

Faire de la recherche, ça a toujours été une évidence pour toi ?

Pas de tout. D’ailleurs, à l’origine, je pensais ne pas aimer ça mais j’ai eu l’opportunité de faire un stage sur les enrobés bitumineux [matériaux utilisés pour les routes, ndlr] au Laboratoire de tribologie et dynamique des systèmes (LTDS) lors de ma première année de Master. L’équipe était géniale, j’ai rencontré plein de doctorants et de doctorantes, nous avons fait beaucoup d’expérimentations et je me suis dit que, finalement, la recherche pouvait être intéressante. J’ai donc décidé de poursuivre dans cette voie, je ne voulais pas regretter de ne pas avoir tenté l’expérience. J’ai effectué un autre stage sur le stockage d’énergie en seconde année puis j’ai contacté un enseignant-chercheur que j’avais rencontré au LTDS, Antonin Fabbri, qui m’a aidée à trouver un sujet de thèse et qui est aujourd’hui mon co-directeur avec Nassim Sebaibi, le responsable du Builders Lab.

Ta thèse, justement, tu nous en parles ? Sur quoi travailles-tu ?

Je mène des recherches sur les matériaux respectueux de l’environnement, et plus particulièrement la bauge [mélange de terre argileuse et de paille historiquement utilisé en Angleterre, ndlr]. Cette orientation environnementale est très importante, c’est une vraie conviction personnelle à laquelle je m’intéresse depuis le début de mes études et mon “DUT Génie civil - Construction durable” à l’université Claude Bernard - Lyon 1.

La construction en terre existe depuis longtemps et présente de nombreux avantages mais elle souffre d’un manque de normes et de réglementations qui empêchent son développement. La recherche s’est donc mobilisée sur le sujet, notamment en France et au Royaume-Uni, pour permettre, à long terme, la normalisation de ce mode de construction.

Je participe à cet objectif à mon niveau en développant un modèle numérique d’une maison témoin située à Carentan-les-Marais. J’utilise pour cela les travaux menés par deux autres doctorants dans le cadre du programme européen “CobBauge” et je les complète en ajoutant des nouvelles données, plus précises, sur le confort hygrothermique [température et humidité, ndlr] de la maison. Je m’intéresse aussi à la qualité de l’air, notamment à l’évolution des concentrations de CO2, un sujet dont on a beaucoup entendu parler pendant le confinement de 2020 et qui peut avoir un fort impact sur nos capacités de travail et de concentration.

Un sujet très intéressant et assez méconnu, aussi. C’est pour le faire connaître que tu as eu envie de participer à “Ma thèse en 180 secondes” ?

Tout comme la recherche, c’est à l’ENS Paris-Saclay que j’ai découvert “Ma thèse en 180 secondes” grâce à l’un de mes enseignants de Master qui nous a lancé le défi de présenter un poster en trois minutes. Je ne connaissais pas le concours alors j’ai regardé pas mal de vidéos et je me suis sentie très admirative. Les candidats et les candidates avaient l’air tellement à l’aise, elles et ils avaient une éloquence folle et une façon étonnante de rendre simples des sujets parfois très complexes. Je me suis dit que, si je faisais une thèse, je me lancerai dans le concours.

Et alors, as-tu apprécié l’expérience ?

J’ai failli tout arrêter après la session de formation ! [rires, ndlr] Nous devions présenter notre sujet de recherche en une minute devant les autres candidats et candidates. Tous et toutes semblaient maîtriser leur discours mais moi, j’ai eu l’impression de raconter n’importe quoi. Je crois que je m’étais mise une trop grande pression ! Les choses se sont améliorées après, tout était intéressant, et j’ai adoré rencontrer et échanger avec les autres doctorants et doctorantes. N’étant pas originaire de Normandie, je ne connaissais pas beaucoup de monde. Ce concours a été l’occasion de m’ouvrir à d’autres personnes, de découvrir d’autres domaines de recherche. Je ne savais pas que l’on faisait de la recherche sur les crèmes solaires et les crevettes. Ça a aussi été une opportunité de parler du mien.

Est-ce que cela t’a donné envie de t’impliquer dans des actions de diffusion des sciences ?

À l’avenir, oui, certainement. Pour l’instant, c’est incompatible avec mon agenda alors je me concentre sur mes recherches. Il me reste environ 6 mois d’expérimentation, 6 mois de modélisation numérique et 6 mois de rédaction de thèse. On verra ensuite selon les occasions qui se présenteront. J’aime autant la recherche que l’enseignement et je sais que l’on peut faire les deux.

Il ne nous reste donc plus qu’à te souhaiter le meilleur pour la finale nationale !

Merci. J’aurais adoré que Laurie, la lauréate du Prix du public 2025, puisse être avec moi. Elle est très agréable, pleine d’énergie et elle m’a aidé à mieux gérer mon stress mais mes parents devraient être là. Elle et il ont déjà vu au moins 10 fois la vidéo de la finale régionale !

Le concours “Ma thèse en 180 secondes” est organisé par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et France universités. En Normandie, il est coordonné par Normandie université et le CNRS Paris-Normandie, en partenariat avec Le Dôme et le soutien de la CASDEN Banque populaire.

Crédits : Le Dôme / G. Dupuy (DR)


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